Coupes budgétaires dans la culture : la musique actuelle est-elle en train de mourir en silence ?
- Anne-Louise GAYMARD
- il y a 30 minutes
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Pendant qu’on parle d’intelligence artificielle et de croissance verte, un pan entier de notre culture est en train de s’effondrer à petit feu. Sans bruit. Sans scandale. Mais avec des conséquences bien réelles : en 2025, les coupes budgétaires dans la culture atteignent un niveau inédit. Et en première ligne ? Les musiques actuelles.
Le rapport du SMA (Syndicat des Musiques Actuelles), publié en avril 2025, tire la sonnette d’alarme. Ce n’est pas juste une baisse de subventions : c’est un effet domino qui menace la diversité musicale, l’accès à la culture, les artistes émergents, et des milliers d’emplois.
DES CHIFFRES QUI PIQUENT : - 65,8 MILLIONS D'EUROS EN MOINS
13 régions françaises ont baissé leur budget culture. Parfois légèrement. Mais souvent drastiquement : -46,9% en Pays de la Loire, -21,8% en Nouvelle-Aquitaine, -20% en Île-de-France. Certaines villes comme Toulouse, Saint-Nazaire ou Rennes réduisent ou gèlent carrément leurs soutiens. Résultat : les structures n’ont plus la visibilité ni les moyens pour programmer des concerts ou accompagner les artistes.
Et ce n’est pas tout. Le budget du ministère de la Culture chute aussi. Le Centre National de la Musique perd 1,3 million d’euros. Le Pass Culture, outil clé d’inclusion, voit sa part collective gelée. Les organismes de gestion collective (SACEM, ADAMI...) subissent des baisses. Bref : plus personne n’est épargné.
CONSÉQUENCES : LA BOMBE À RETARDEMENT EST ENCLENCHÉE
Les impacts sont concrets, immédiats et dévastateurs. Un florilège des témoignages recueillis par le SMA :
8 concerts annulés à Lyon, 1 poste supprimé.
Des projets scolaires annulés pour 600 enfants.
Jusqu’à 31 groupes déprogrammés dans certains festivals.
Des projets en prison ou en EHPAD annulés.
Des augmentations tarifaires pour les publics les plus précaires.
On parle de concerts annulés, de formations repoussées, de postes supprimés, de festivals menacés, d’artistes qui ne pourront pas émerger.
LE PIÈGE : MOINS DE SUBVENTIONS = MOINS D'ACTIVITÉS = MOINS D'AIDES
Le système est pensé comme un moteur. Pour bénéficier d’aides, il faut produire. Mais quand les financements baissent, les structures annulent. Et en annulant, elles deviennent inéligibles à d’autres financements. C’est un cercle vicieux qui se referme, en silence, sur un secteur entier.
MAIS POURQUOI C'EST GRAVE ?
Parce que les musiques actuelles, ce n’est pas juste des concerts et des festivals. C’est :
de l’éducation populaire,
du lien social dans les quartiers,
de l’accès à la culture pour tous,
de l’accompagnement pour les jeunes artistes,
des emplois locaux, souvent associatifs, souvent féminisés,
un rayonnement international (la French Touch ne s’est pas faite toute seule...).
Couper dans la culture, c’est choisir une société plus inégalitaire, plus silencieuse, plus lisse.
DES SOLUTIONS ? OUI MAIS IL FAUT UNE VOLONTÉ POLITIQUE.
Le rapport du SMA ne se contente pas de constater. Il montre aussi la résilience et l’innovation des structures : festivals en zones rurales, ateliers pour femmes en réinsertion, concerts dans des EHPAD, soutien aux musiques urbaines, projets d’éveil musical, actions en milieu carcéral… Ce tissu culturel est vivant. Mais fragile. Et sans soutien, il risque de disparaître.
ET SI ON ARRÊTAIT DE PRENDRE LA CULTURE POUR UNE VARIABLE D'AJUSTEMENT ? MUSIQUE ACTUELLE
On ne peut pas vouloir une société inclusive, créative, vivante… et sacrifier celles et ceux qui la rendent possible. La culture, ce n’est pas un luxe. C’est un pilier. Et comme tout pilier : si on le détruit, tout s’écroule.
En 2025, il est temps d’arrêter de faire des coupes… et de commencer à recoudre.
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